Diversifier pour rentabiliser
Entretien avec Régis Ferey, chef pâtissier, champion de France Viennoiserie 2013, enseignant-formateur à Ferrandi Paris.
La Toque Magazine (L.T.M.) : Comment l'artisan peut-il rentabiliser aujourd'hui sa production de pâtes levées/feuilletées ? Régis Ferey (R.F.) : « La production de viennoiseries (qualité, régularité) nécessite des connaissances techniques pointues en boulangerie (pétrissage et fermentation) et en pâtisserie (tourage et fourrage), ce qui exige une main d'oeuvre qualifiée, malheureusement rare aujourd'hui. Le temps de production et l'investissement en matériel (laminoir, chambre de fermentation) impactent aussi la rentabilité. Pour dégager du bénéfice, il faut produire et écouler davantage de pâtes. Pour cela, il faut monter en qualité et diversifier son offre en l'élargissant à d'autres occasions, comme le goûter ou le déjeuner. Le snacking sucré et salé est un axe à prendre car il se prête bien aux pâtes de viennoiseries. Avec une même base à croissant, à brioche ou à pain viennois, on peut élaborer de multiples produits revisités ou totalement décalés. La maîtrise technique, acquise par une formation de bon niveau, apportera aussi de l'organisation, de la productivité et des procédés permettant d'augmenter la durée de vie des produits. »
L.T.M. : Quelles sont les tendances en termes de snacking ?R.F. : « La recherche de viennoiseries plus légères, moins grasses est une tendance de fond. La brioche surfine (à base de crème fraîche) ou la brioche feuilletée (plus aérienne) sont des bases intéressantes. L'intégration de fruits (confitures, compotées, pépites, fruits secs…) apporte des couleurs attractives et rassurent sur le plan nutritionnel. Ces produits plaisent aux parents pour le goûter de leurs enfants. Avec des gélifiants naturels, on peut élaborer facilement des fourrages stables qui se prêtent bien à une consommation nomade. Les recettes régionales de brioches (gâche vendéenne, kougelhopf alsacien, brioche de Saint-Genix, pogne de Romans…) sont aussi une tendance à prendre en artisanat (même si on n'habite pas la région !). Elles peuvent être revisitées de mille façons (nonette, escargot, serpentin, bâtonnet…), toute comme la brioche feuilletée qui est plus récente. Les viennoiseries à partager en famille (en modules détachables) sont une bonne idée pour le week-end. »
L.T.M. : Entre innovation et tradition, quel équilibre trouver en magasin ? R.F. : « Pour le petit-déjeuner (et même le goûter), le classique fera toujours des records de vente. Mais la nouveauté attire le regard, dynamise l'image du commerce et rassure les clients sur le fait maison. Les clients apprécient aussi le petit grain de folie sur des instants de consommation très traditionnels comme peut l'être le petit-déjeuner du dimanche. Les produits originaux peuvent représenter le quart de la gamme du petit-déjeuner. En journée, l'innovation doit prendre davantage de place. C'est pourquoi la présentation des produits en magasin doit aussi évoluer. Le matin, il faut mettre les viennoiseries à proximité du pain. Dès 11 h, les déplacer vers le linéaire à pâtisserie sèche ou à desserts inclus dans les formules et à 16 h, à une hauteur visible par les enfants. Le soir et le week-end, les produits apéritifs iront bien à côté de la caisse et les viennoiseries salées, à proximité des snacks gratinés… La diversification doit tenir compte des différentes gammes présentées à la vente. »
Viennoiserie maison : les stages de formationPropos recueillis par Armand Tandeau (publié le 17 novembre 2016)